Accueil > Relations entre le lapin et son propriétaire > Le comportement du lapin malade
1. Les lapins expriment très discrètement leurs problèmes de santé et leur douleur
Les lapins sont des animaux de proie. Lorsqu’ils sont blessés ou malades, ils tentent de dissimuler le plus possible cette faiblesse afin de ne pas être repérés comme une proie facile par les prédateurs. Un état de faiblesse trop apparent serait pour eux une condamnation à mort.
Tant qu’il en sera capable, le lapin malade continuera donc à vivre normalement, et à faire comme les autres lapins, sans rien laisser paraître de sa maladie, de sa blessure ou de sa douleur.
Un lapin très malade et/ou douloureux aura tendance à se cacher au fond de sa cabane, à rester sous un meuble, à se positionner dans un coin de sa cage, pour échapper le plus possible aux regards. Il essaiera également le plus souvent de s’éloigner des autres lapins avec lesquels il vit, de s’isoler. Parallèlement, les autres lapins ont également tendance à rester à distance de lui la plupart du temps.
Il est donc très difficile de percevoir de prime abord les signes extérieurs d’une maladie ou d’une blessure chez son lapin, si l’on n’y prête pas une attention minutieuse. Par ailleurs, il ne faut surtout pas imaginer que le lapin ne souffre pas simplement parce que les signes extérieurs de douleurs dont il témoigne sont faibles et peu perceptibles.
2. Les signes de maladie et de douleur chez votre lapin
2.1. Le langage corporel de la douleur
Un lapin qui souffre peut présenter les comportements suivants (le plus souvent, plusieurs comportements sont associés):
– il mange moins, il ne mange plus certains aliments, il arrête de manger (anorexie) et/ou de boire; il fait moins de crottes, des crottes de très petite taille ou ne fait plus de crottes;
– il reste couché « en poule » (sur ses quatre pattes, ramassé sur lui-même, les oreilles couchées) dans un coin de sa cage, de son enclos ou de la pièce (quand le lapin est au plus mal, il a tendance à mettre son museau dans le coin en question), il semble abattu, immobile et amorphe; il reste caché dans sa cabane ou sous un meuble;
– il bouge très peu, ne se déplace plus jusque dans son bac à litière pour faire ses besoins;
– il a le dos voûté lorsqu’il s’étire; il se tient de manière voûtée;
– il garde la tête excessivement relevée, le cou tendu;
– il garde les yeux fermés, mi-clos, son regard semble vitreux, terne, vide; il a les yeux exorbités ou plissés;
– il reste couché, tout étalé sur le sol, appuie son abdomen sur le sol, et se redresse brusquement, à de très nombreuses reprises;
– il adopte une posture anormale ou inhabituelle quand il est immobile ou quand il essaie de se déplacer (boiterie, raideur); il marche au lieu de sauter quand il se déplace;
– il grince très bruyamment des dents (bruxisme); certains lapins poussent également de petits gémissements respiratoires ou de petits cris;
– il respire très rapidement, difficilement; il semble trembler;
– il se gratte ou se lèche tout le temps au même endroit; il arrache des poils au niveau d’une zone particulière de son corps; il fait trop ou pas assez souvent sa toilette;
– il ne prête plus attention à vos sollicitations, ni à celles de ses congénères; il secoue la tête et repousse votre main quand vous essayez de le caresser;
– il tente de s’éloigner et de s’isoler de ses congénères, il ne participe plus aux activités habituelles (repas, siestes collectives, jeux, …);
– il se montre soudain agressif avec les autres lapins ou avec vous (comportement inhabituel).
2.2. d’autres éléments qui doivent attirer votre attention
D’autres signes extérieurs de maladie sont évidemment à prendre en compte. Par exemple:
– le lapin ne fait plus de crottes, fait des crottes de très petites tailles, du mucus, des diarrhées, ou des crottes d’aspect anormal; il fait des bruits de gargouillis très importants (coliques); son abdomen semble très dur;
– il urine très fréquemment, il montre des difficultés pour uriner (il se met en position pour uriner, mais ne fait que quelques gouttes), il n’urine plus ou très peu, il semble uriner du sang (à ne pas confondre avec les urines colorées);
– il perd du poids rapidement, il paraît amaigri, on sent soudain ses côtes et sa colonne vertébrale en le caressant;
– il dégage une odeur désagréable et/ou inhabituelle; ses oreilles, son fanon sont souillés, son arrière-train est très sale (urine et/ou selles);
– il a une température anormale, trop élevée (fièvre) ou trop basse (hypothermie); il passe son temps à dormir et semble se réveiller très difficilement;
– il présente des difficultés pour se déplacer, tourne en rond, fait des chutes, penche la tête sur le côté;
– son poil est terne, rêche, piqué, il présente des zones sans poils, des pellicules, des croûtes;
– il saigne, présente une plaie, une brûlure; il présente une grosseur inhabituelle à la mâchoire, ou sur une autre partie de son corps; il secoue très fréquemment la tête et se gratte les oreilles avec insistance;
– il respire avec beaucoup de difficulté, fait du bruit en respirant, garde la gueule ouverte et la tête relevée pour respirer; il a les yeux ou le nez qui coulent, il éternue…
>>> Dans ces différents cas, consultez un vétérinaire dans les meilleurs délais, en précisant bien les principaux symptômes et signes de douleur que vous avez remarqué chez votre lapin, lors de la prise de rendez-vous, afin que la clinique vétérinaire puisse savoir s’il s’agit d’une urgence ou pas.
3. La coopération avec les soignants dans la prise en compte du comportement
3.1. Être attentif au comportement et aux symptômes du lapin
Lorsque votre lapin est malade, vous pouvez être tenté de le rassurer, de le câliner, de le caresser, éventuellement de le masser. C’est une excellente intention qui peut être bénéfique à votre lapin si vous en êtes très proches. Toutefois, dans le doute et dans l’attente d’un diagnostic vétérinaire, évitez de trop le manipuler, en dehors des premiers soins, surtout s’il est douloureux et semble vouloir rester à l’écart, car vous pourriez accentuer une blessure ou une douleur.
Vous avez cependant un rôle primordial à jouer pour votre lapin malade: observer son comportement et ses symptômes, surveiller leur évolution, et les noter au fil du temps, si possible sur un papier, afin de pouvoir faire par la suite un compte-rendu précis à votre vétérinaire et ne rien oublier. Ces informations, très utiles, faciliteront l’établissement d’un diagnostic.
En effet, votre lapin ne peut pas parler de sa maladie ou de sa douleur au vétérinaire, comme nous le faisons lorsque nous allons chez le médecin. Très souvent aussi, son comportement à la clinique vétérinaire ne sera pas représentatif de son comportement au cours des précédents jours / des précédentes heures à la maison, en raison du stress de la consultation. C’est pourquoi il est important de noter tout changement d’attitude, même si celui-ci semble insignifiant de prime abord.
3.2. Lors de la visite à la clinique vétérinaire
La visite chez le vétérinaire (avec les déplacements qu’elle implique) peut être une source de stress important pour votre lapin. Il est donc important que vous soyez détendu et serein (dans la mesure du possible!), afin de ne pas accroître la peur et l’anxiété de votre animal.
Évidemment, il vaut mieux habituer son lapin à sa cage de transport, en la laissant dans son environnement familier (enclos, espace de promenade), afin qu’elle ne soit plus qu’une cabane ou une cachette comme les autres. Mieux vaut aussi, dans la mesure du possible, que le lapin soit habitué aux transports (voiture, transports en commun) et que ceux-ci ne soient pas uniquement synonyme d’une visite à la clinique vétérinaire. Ces différentes habitudes permettent de diminuer le stress du lapin le jour de la consultation.
Pensez à préparer à l’avance sa cage de transport et les différents éléments à emmener chez le vétérinaire (son carnet de santé, vos notes sur ses symptômes au cours du temps, de l’eau et de la nourriture si le transport est long, une bouillotte ou un pain de glace pour la cage de transport en fonction de la météo, des serviettes de toilette…) et à ne pas partir en retard de chez vous. Ne choisissez pas des vêtements fragiles pour emmener votre lapin chez le vétérinaire: votre lapin malade pourrait très bien uriner sur vous, écraser des selles sur votre pull, trouer votre chemise, ou tout simplement vous couvrir de poils de la tête aux pieds! Il faut cependant que vous puissiez rester concentré sur votre lapin et sur le dialogue avec le vétérinaire.
Une fois arrivé à la clinique, essayez de rassurer le plus possible votre lapin, de diminuer son anxiété (qui peut rendre plus difficile l’établissement du diagnostic et l’évaluation de la douleur par le vétérinaire), par exemple en le caressant ou en le gardant dans vos bras ou dans vos vêtements contre vous, pendant que vous êtes dans la salle d’attente, si votre lapin apprécie ces gestes habituellement et que sa température corporelle est normale. Sinon, laissez-le dans sa cage de transport, au calme, à côté de vous. Veillez à ne pas placer la cage de transport juste à côté d’un chien. Si votre lapin est agité, mieux vaut le laisser dans sa caisse de transport, car un accident est vite arrivé, s’il s’échappe et qu’un chien se trouve aussi dans la salle d’attente. N’hésitez pas à dire que vous ne souhaitez pas que votre lapin soit caressé, quand un autre client s’approche de lui, si vous pensez que cette personne ou son animal peuvent stresser votre lapin.
Tout au long de la consultation, n’oubliez pas que c’est vous qui disposez d’une bonne connaissance du comportement particulier de votre lapin. Chaque lapin est unique et a sa propre histoire, même si les vétérinaires (du moins ceux qui voient de nombreux lapins chaque semaine en consultation) connaissent bien le comportement habituel des lapins lors des examens et les exceptions qui peuvent exister. Certains lapins sont plus expressifs que d’autres: vous pouvez indiquer au vétérinaire que tel ronflement-grognement est habituel quand votre lapin est contrarié, ou au contraire que votre lapin est habituellement très réservé et silencieux même en situation de stress intense et que le petit gémissement qu’il vient d’émettre indique qu’il est vraiment poussé dans ses derniers retranchements.
Essayez également d’anticiper, avec calme et circonspection, tout mouvement brusque de votre lapin, toute manifestation de panique, toute tentative de saut dans vos bras ou de fuite de la table de consultation: un accident est vite arrivé. Si votre vétérinaire n’utilise pas de serviette de toilette pour placer le lapin sur la table d’auscultation, n’hésitez pas à en ramener une de chez vous: un lapin qui passe son temps à glisser et déraper risque de stresser davantage.
Avant l’auscultation de votre lapin, lorsque vous expliquez les raisons de votre visite, faites votre compte-rendu sur le comportement et les symptômes de votre lapin au vétérinaire, comme vous le feriez lorsque vous allez chez le médecin: c’est le moment de sortir le papier sur lequel vous avez tout noté, si vous craignez d’oublier quelque chose. Pensez à lui rappeler très brièvement les précédentes pathologies de votre lapin (même s’il a son dossier ou son carnet de santé sous les yeux), ou plus longuement s’il ne s’agit pas du vétérinaire qui suit habituellement votre lapin (il peut être utile dans ce cas d’apporter tous les documents vétérinaires dont vous disposez: prescriptions, factures indiquant les actes réalisés, etc).
Pendant l’auscultation, les divers examens, puis les explications du vétérinaire, écoutez-le attentivement (malgré les éventuelles émotions face à l’annonce d’une mauvaise nouvelle). Le vétérinaire peut également avoir besoin de votre aide pour tenir votre lapin: soyez ferme, posé et efficace avec votre animal.
N’hésitez pas à poser toutes les questions qui vous paraissent nécessaires pour comprendre le problème de santé de votre lapin et les traitements que propose le vétérinaire (il n’y a pas de mauvaise question ni de question stupide). Il est toujours plus prudent et motivant de soigner son animal lorsque l’on comprend bien pourquoi et comment. Dans certains cas graves, le vétérinaire vous expliquera également les éventuels risques des traitements et les chances de guérison.
Vous pouvez vous renseigner avant et surtout après la consultation sur la maladie de votre lapin en effectuant des recherches sur internet. Cependant, n’oubliez pas que l’on trouve de tout sur internet: de bons conseils pratiques en attendant la visite à la clinique, tout comme des recommandations ou des avis aberrants, voire dangereux. Pensez aussi que chaque cas est particulier. Gardez bien à l’esprit, enfin, qu’il ne s’agit que de pistes et de compléments aux informations que vous apportera le vétérinaire. Lui seul est compétent pour poser un diagnostic. Faites confiance à son expérience des lapins (qui est habituellement très bonne chez les vétérinaires spécialisés dans les nouveaux animaux de compagnie – NAC) qu’il a acquise au fil des années, en plus de ses connaissances théoriques.
Demandez également à votre vétérinaire le maximum de détails sur les soins que vous allez devoir ensuite réaliser chez vous (matériel nécessaire, fréquence, dosage, modalités d’administration, quand commencer le traitement, quand l’arrêter). N’hésitez pas à demander des explications écrites pour être certain de tout avoir compris et de ne rien oublier une fois arrivé à la maison. Ne partez pas avant d’être parfaitement capable d’effectuer les soins, quitte à redemander une explication ou une démonstration. Le vétérinaire ou une de ses assistantes peut en effet vous montrer comment procéder concrètement en administrant une première fois le traitement devant vous.
Pensez enfin à demander à votre vétérinaire quels sont les signes d’aggravation de l’état de votre lapin qui pourraient nécessiter une nouvelle visite anticipée à la clinique. Et n’oubliez pas, si nécessaire, de fixer la date de la prochaine visite de contrôle avant de partir.
Lire également: Comment votre lapin se comporte-t-il quand vous l’emmenez chez le vétérinaire?
3.3. Lors de l’hospitalisation à la clinique vétérinaire
Au cours de l’hospitalisation, le lapin, déjà perturbé par sa maladie, perd tous ses repères: il est loin de son territoire, loin de ses éventuels congénères, loin de son propriétaire. Il se retrouve entouré d’odeurs et de bruits inconnus, d’autres animaux malades qu’il ne connaît pas dans les cages voisines (parfois même avec des prédateurs, comme des chiens ou des chats) ou même des congénères qui expriment leur douleur et parfois décèdent dans le boxe à côté du sien… Pour un animal routinier comme le lapin, c’est un stress très important. Évidemment, l’hospitalisation est une nécessité dans l’intérêt de la santé de votre lapin. Mais il est préférable qu’elle soit de courte durée et que vous vous chargiez des soins à la maison dès que le vétérinaire estimera que cela est possible.
En attendant la sortie de votre animal, vous pouvez tenter de rendre son hospitalisation plus agréable. Si la clinique vétérinaire qui l’a pris en charge n’est pas trop éloignée de chez vous et si elle vous offre cette possibilité, il est souhaitable de passer rendre visite à votre lapin chaque jour. En vous voyant, en vous sentant et en entendant votre voix, votre lapin se sentira plus rassuré et apaisé, ce qui demeure un paramètre non négligeable en vue de la guérison. Parlez doucement à votre lapin, avec un ton de voix rassurant, soyez naturel, comme d’habitude avec votre animal, même si vous êtes sous le regard d’un vétérinaire ou d’une assistante. Apportez-lui un peu de ses habitudes et de sa maison à la clinique.
En fonction de la pathologie de votre lapin et avec l’accord du vétérinaire, ces visites peuvent être aussi l’occasion de lui apporter son alimentation habituelle (foin, légumes, granulés), de lui faire un petit câlin/massage, ou de le laisser se dégourdir les pattes sous votre surveillance. Vous pouvez aussi apporter à votre lapin un doudou, un petit tapis en coton ou un morceau de tissu qui est habituellement dans son lieu de vie, qu’il apprécie particulièrement et qui est imprégné de son odeur (et éventuellement de celle des congénères avec lesquels il vit), sans toutefois encombrer son box d’hospitalisation. Ce petit détail, accompagné de l’alimentation habituelle du lapin, permet de recréer un univers olfactif qui lui est un peu plus familier. Vous êtes également la personne la mieux placée pour connaître les aliments préférés de votre lapin et les lui apporter: cela peut être décisif pour l’inciter à s’alimenter après une opération ou en cas de problème digestif.
Essayez, si vous en avez la possibilité, de passer à la clinique vétérinaire aux heures creuses de la journée (les assistantes du vétérinaire pourront vous renseigner à ce sujet), afin d’avoir en face de vous des soignants plus disponibles, détendus et à l’écoute. La visite d’un animal hospitalisé peut-être l’occasion de discuter avec le vétérinaire qui soigne votre lapin de son évolution et des traitements mis en place pour le soigner.
Par ailleurs, si vous êtes proche de votre lapin, ne passez pas à côté des périodes durant lesquelles il est hospitalisé, si vous en avez la possibilité matérielle. Il peut être tentant de se décharger de la maladie ou même de la fin de vie de son animal sur le vétérinaire, car ce sont des instants pénibles. Votre lapin a pourtant particulièrement besoin de vous dans ces moments-là. Il peut être également profitable de participer, même en simple témoin, à l’occasion des visites à la clinique, à ce moment délicat, pour éviter que vous soyez ensuite assailli de doutes et de questions sur les soins qui ont été apportés à votre lapin ou sur les conditions dans lesquelles il est mort, et de regrets de ne pas avoir eu l’occasion de le revoir une dernière fois. Il ne s’agit peut-être « que » d’un animal, mais d’un animal de compagnie qui partage votre quotidien, parfois depuis des années.
Les anglo-saxons conseillent parfois d’hospitaliser un lapin avec son congénère habituel, même si ce dernier n’est pas malade. Cela permettrait au lapin d’être moins stressé et anxieux, augmentant par conséquent les chances de réussite du traitement. Cela éviterait également des changements importants dans la hiérarchie du groupe en l’absence du lapin malade et un rejet de ce dernier lors de son retour de la clinique. C’est un point de vue très intéressant, sur le plan du comportement. Toutefois, peu de cliniques vétérinaires disposent d’équipements permettant d’accueillir plusieurs lapins ensemble.
On peut également estimer qu’il est préférable de ne pas hospitaliser des lapins en bonne santé: outre le fait qu’ils risquent de subir un stress inutile, malgré la présence de leurs compagnons, ils peuvent également attraper des maladies à la clinique, même si celle-ci est irréprochable sur le plan de l’hygiène (c’est un peu le problème des infections nosocomiales à l’hôpital). Il ne faut pas oublier non plus que certaines maladies sont très contagieuses et nécessitent l’isolement du lapin malade, même après son retour à la maison.
4. Le comportement du lapin lors des soins à la maison
4.1. Soigner son lapin à la maison
Il est fréquent, même (et surtout) après une hospitalisation de votre lapin, de devoir effectuer des soins à la maison. L’attitude des propriétaires est alors très diverse, en fonction du caractère et de la sensibilité de chacun. Certains propriétaires de lapins se sentiront incapables de lui administrer un médicament avec une pipette par voie orale, d’autre de réaliser des injections sous-cutanées, d’autres bloqueront sur l’administration d’un médicament par voie rectale, d’autres encore ne parviendront pas à nettoyer une plaie ouverte ou un abcès. Il n’y a aucun jugement à porter en la matière: nous faisons tous avec ce que nous sommes.
Cependant, quelles que soient vos possibilités, si votre lapin a besoin d’un traitement, il faut impérativement qu’il le reçoive et il ne faut surtout pas le laisser sans soins. Il vaut mieux prévenir le vétérinaire, dès la consultation, des soins que vous vous sentez incapable de réaliser seul ou le contacter par téléphone si vous êtes en situation d’échec répété lorsque vous tentez de donner un médicament.
Votre vétérinaire peut alors vous proposer un autre mode d’administration du médicament ou un autre médicament. Vous pouvez aussi vous organiser avec lui pour porter votre lapin chaque jour à la clinique afin qu’il réalise à votre place les injections nécessaires.
Sachez que la plupart des vétérinaires attendront tout de même de vous que vous réussissiez à administrer un médicament par voie orale: aussi, encore une fois, demandez à votre vétérinaire ou à son assistante de vous montrer concrètement comment faire, et essayez éventuellement de le faire une fois avec son aide à la clinique. Pensez qu’en matière de soins vétérinaires, il n’existe pas d’équivalent des infirmières à domicile et que vous aurez souvent à jouer ce rôle… et que nécessité fait loi. Rappelez-vous aussi que plus vous serez détendu et confiant, plus les soins auront des chances de se dérouler facilement.
En fonction de votre comportement, de celui de votre lapin et du type de soins à réaliser, les soins peuvent être un moment de détente, de bien-être ou de soulagement, un instant rapide et efficace que l’on oublie vite, une période difficile et éprouvante de la journée qui inquiète, stresse et fatigue, ou même un combat épuisant qui donne parfois l’impression que l’on est à la limite de la maltraitance avec son animal…
Les lapins réagissent très diversement aux soins (voir notamment: Les lapins et la maladie). Face aux mêmes traitements, certains seront très conciliants, d’autres seulement mécontents, d’autres encore se battront avec vous tellement ils refusent ces soins. Il est difficile, lorsque l’on a qu’un seul lapin et peu d’expérience des soins, de savoir si le comportement de son lapin est habituel ou si c’est nous qui nous y prenons mal. En cas de doute, il peut être utile d’en parler au vétérinaire et/ou à plusieurs propriétaires de lapins qui ont dû réaliser les mêmes soins. Certains médicaments (comme la tiamuline) peuvent également entraîner de fortes réactions chez votre lapin après la prise: mieux vaut le savoir à l’avance! 🙂
Certaines méthodes peuvent également vous aider dans les soins de votre lapin: voir les articles Prendre son lapin dans les bras, Mettre son lapin en transe, Des massages pour détendre son lapin, ainsi qu’un article sur L’entraînement médical ou conditionnement vétérinaire.
4.2. Ne pas glisser du nursing à l’anthropomorphisme
Certains lapins apprécient particulièrement les périodes de soins: ils sont au centre de vos préoccupations, se font chouchouter, ont parfois accès à des endroits habituellement interdits (lit, canapé…), et prennent souvent une place privilégiée par rapport aux autres membres de leur couple ou de leur groupe habituel.
Il est cependant important de continuer à porter la même attention aux autres animaux de la maison (n’oubliez pas le principe malheureusement trop souvent vérifié selon lequel la maladie d’un animal peut cacher la maladie d’un autre animal) et de maintenir les rituels quotidiens qui structurent la journée, même si cela semble parfois très difficile.
Le lapin malade, dont l’état de dépendance envers son propriétaire est accentué, peut apparaître comme une petite chose fragile que l’on a envie de dorloter et de protéger. En un sens, ce réflexe humain est très utile pour votre lapin qui aura besoin de votre présence rassurante, de votre surveillance attentive et de vos soins. Mais même malade, votre lapin reste un lapin. Veillez à rester attentif à ses comportements de lapin, à respecter ses attitudes et préférences habituelles et son langage corporel, et ne tombez pas dans l’anthropomorphisme…
L’objectif est de permettre à votre lapin de se rétablir le plus rapidement possible et de reprendre ensuite sa vie de lapin de compagnie, d’une manière moins dépendante de vous.
4.3. Veiller au comportement général du lapin
Tout au long du traitement du lapin à la maison, vous devez continuer à noter l’évolution de son comportement et de ses symptômes, et informer votre vétérinaire si vous constatez une dégradation de son état. Lorsque les traitements sont longs et que la routine s’installe, il est souvent difficile de maintenir un bon niveau de vigilance: cela reste toutefois essentiel pour votre lapin.
4.4. L’accompagnement d’un lapin souffrant d’une maladie chronique ou d’une pathologie de longue durée
Toutes les remarques précédentes sont évidemment valables pour les lapins souffrant de pathologies de longue durée ou de maladies chronique. Une relation spéciale de dépendance s’installe souvent dans ce cas, et il faut être encore plus vigilant sur le rôle que l’on fait jouer à son animal de compagnie et ne jamais perdre de vue son bien-être de lapin.
Toutefois, il est très compréhensible, voire parfois nécessaire, d’établir un lien spécial avec son animal, quand le contexte est difficile. Il ne faut pas oublier que le fait d’avoir un animal de compagnie doit rester un plaisir. Je comprends donc très bien (et pour cause) les propriétaires qui, face à une succession d’épreuves liées à l’état de santé de leur lapin, lui donnent une place que, vu de l’extérieur, certaines personnes trouveront étrange, dérangeante ou déplacée. Il est alors toujours rassurant d’aller voir ce qui se fait du côté anglo-saxons pour se dire que notre culture française de l’animal nous préserve de bien des excès… et pour être décomplexé par rapport à certains choix que l’on peut faire 😉
Il ne faut jamais oublier, dans ces cas particuliers, le courage du propriétaire, qui vit parfois avec la crainte permanente de nouvelles complications ou de perdre un animal auquel il est très attaché et qui doit réaliser chaque jour de nombreux soins, parfois très contraignants. Car c’est là toute l’ironie de l’histoire: plus un lapin est malade et dépendant de nous pour sa survie (tout en continuant à pouvoir vivre décemment sa vie de lapin, bien entendu), plus il occupe une place importante dans la vie quotidienne, plus l’attachement à ce petit animal est fort, et moins nous avons envie de le perdre. Et, la plupart du temps, plus cette situation d’exception dure, plus l’affection que l’on a pour ce lapin est importante.
A chacun de trouver un équilibre dans ces cas souvent difficiles… Mais il est alors essentiel d’être accompagné par son conjoint, ses proches et éventuellement d’autres personnes qualifiées, afin d’éviter tout excès. C’est une question de bon sens et de préservation de son bien-être personnel et de celui de l’animal.
Voir aussi: L’accompagnement de Cheyenne dans la maladie
Ainsi que les divers articles du blog sur les maladies de Tarquin et Hermès
5. L’évolution du lien entre le lapin et son propriétaire au fil des soins
5.1. L’établissement d’une confiance absolue
Lorsque le lapin est très malade et qu’il est douloureux, une sorte de déclic peut se produire, avec le soulagement que lui apporte son propriétaire lors des soins, un peu comme s’il se rendait compte de son état de dépendance et de la confiance qu’il peut accorder à son propriétaire dont dépend sa survie.
Tout peut alors brusquement changer: un lapin très difficile à soigner, très stressé par les soins, peut alors se montrer très coopératif et beaucoup plus détendu, allant même jusqu’à prendre un comprimé directement dans la main de son propriétaire ou se précipiter pour boire un médicament à la pipette. Il peut aussi se montrer beaucoup plus proche de son propriétaire, rechercher sa compagnie, réclamer des câlins, etc. Une gratification finalement assez satisfaisante quand il faut faire face à de nombreux soins et à de multiples visites chez le vétérinaire.
Quand le lapin va mieux, par la suite, cette proximité d’exception tend heureusement à s’estomper peu à peu, jusqu’à un retour à la normale.
5.2. La mise en place d’une distance liée à des soins mal vécus
A l’inverse, certains lapins vivent très mal les soins qu’ils doivent subir. Il s’opère alors une sorte de rupture qui peut être assez déstabilisante pour le propriétaire: le lapin se met soudain à le fuir dès qu’il tente de le caresser, il l’évite dès qu’il s’approche, il se montre même parfois agressif à son égard. Si cette situation vous arrive, ne vous découragez surtout pas!
Le propriétaire peut éventuellement culpabiliser et penser qu’il a traumatisé son lapin, d’autant plus que cette situation peut parfois durer longtemps, bien après la fin des soins et la guérison du lapin. Il ne faut cependant pas perdre de vue que le principal est d’avoir un lapin bien vivant et en bonne santé. Par ailleurs, avec beaucoup de patience, d’affection et d’attention, une telle situation finit presque toujours par s’arranger.
6. L’évolution des liens avec les autres lapins
La maladie d’un lapin a également un impact sur l’ensemble du groupe au sein duquel il vit.
Sur le plan olfactif, un lapin qui a subi des soins ou a été hospitalisé ramènera à la maison l’odeur de la clinique vétérinaire, et les soins quotidiens à la maison peuvent également modifier son odeur corporelle. Cette situation peut entraîner son rejet du groupe et l’agressivité de ses congénères habituels. Mais ce n’est pas systématique.
L’absence du lapin malade, en raison des visites à la clinique vétérinaire, de son hospitalisation ou d’une nécessaire quarantaine, vient perturber l’organisation sociale du groupe au sein duquel il vit, surtout s’il s’agit d’un dominant: un autre lapin peut alors tenter de prendre sa place et les tensions des débuts de la cohabitation refaire surface. Lorsque le lapin vit en couple, son congénère en bonne santé qui se retrouve soudain seul peut déprimer, se montrer moins actif et moins s’alimenter. Le lapin malade, qui ne présente aucun risque de contagion et peut retrouver la compagnie de ses congénères, peut se montrer soudain agressif à leur égard, notamment en raison de la douleur. Le lapin malade peut enfin se faire harceler par des compagnons en bonne santé, par exemple si un dominé essaye de prendre sa place, alors qu’il est incapable de se défendre. Autant de situations auxquelles le propriétaire doit faire face, en plus des soins du lapin malade.
Il peut être utile, en l’absence de risque de contagion, d’isoler le lapin malade dans une cage ou un enclos à proximité de ses compagnons. Mais s’il existe un risque de contagion et que l’isolement dure plusieurs semaines, il faut se préparer à devoir reprendre entièrement l’établissement de la cohabitation, une fois la convalescence du lapin terminée. Celle-ci sera toutefois souvent plus aisée, car les lapins semblent avoir un peu de mémoire dans ce domaine.
Certaines maladies ne nécessitent aucun isolement du lapin malade. Il est intéressant de constater que des mécanismes de solidarité peuvent alors se développer entre des lapins très proches (principalement lorsqu’ils vivent en couple), qui permettent souvent de faciliter le quotidien et la guérison du lapin malade. Le lapin bien portant peut alors toiletter son compagnon dans les zones que celui-ci ne peut pas atteindre, l’encourager pour réaliser certains gestes du quotidien, pour retrouver les mécanismes de propreté et d’autonomie, ou simplement le veiller et rester auprès de lui quand il ne se sent pas bien.
Ces témoignages de solidarité demeurent toutefois des exceptions lorsqu’un lapin souffre d’une grave maladie et vit au sein d’un groupe. Le réflexe naturel de son compagnon est en effet plutôt de s’éloigner de lui et de tenter de se rapprocher des autres membres bien portants du groupe, pour assurer sa place et sa survie, sans doute à l’image de ce que ferait un lapin de garenne. J’ai toutefois été témoin de ce type de comportement solidaire à plusieurs reprises au sein du groupe de mes dix lapins.
Le comportement du lapin en la fin de vie ou bénéficiant de soins palliatifs, ainsi que la question de l’euthanasie, seront prochainement abordés dans un autre article.