Du lapin de garenne au lapin de compagnie

Les lapins sont domestiqués depuis des siècles (viande, fourrure, laboratoires, concours), mais n’ont pas été sélectionné pour leurs qualités d’animal de compagnie avant une période très récente : leur comportement reste très proche de celui des lapins de garenne

Lapin de garenne

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Lapin de compagnie

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1. Habitat du lapin de garenne 1. Habitat du lapin de compagnie
  • Plusieurs terriers interconnectés en un réseau complexe de galeries, principalement creusées par les lapines ;
  • chaque terrier est occupé par un groupe familial de 3 à 10 lapins en moyenne, mais ce chiffre peut monter à 25 ;
  • une entrée principale large mais camouflée (pour les fuites d’urgence) et de plusieurs autres petites entrées verticales plus discrètes ;
  • une nouvelle chambre (rabouillère) creusée par la lapine en périphérie pour chaque nouvelle portée pendant la saison de reproduction ;
  • la femelle dominante s’installe dans la chambre la plus spacieuse et centrale du terrier ;
  • propreté dans le terrier (les crottes dures sont faites à l’extérieur et les caecotrophes ingérés).
  • il conserve l’instinct de gratter et creuser, même s’il n’en a pas besoin pour construire son habitat (il gratte dans son bac à litière, gratte ses tapis — possibilité de lui offrir un bac à sable, ou un bac rempli de papiers) ;
  • il a besoin de tunnels (bois, textile, osier, carton…) ;
  • il a besoin de cabanes sombres avec plusieurs entrées/sorties pour se reposer ;
  • son lieu de couchage reste normalement toujours propre ;
  • c’est la lapine qui choisit le plus souvent le lieu de couchage dans un couple stérilisé : son mâle la suit.

 

2. Territoire du lapin de garenne 2. Territoire du lapin de compagnie
  • Un territoire qui peut varier de 1 600 à 6 700 m2 ; 80 % des lapins ne s’éloignent pas de plus de 250-300 m de leur terrier (sédentarité) ;
  • les lapins le parcourent pour le marquer, pour faire leurs besoins, chercher leur nourriture et interagir avec leurs congénères ; c’est un vaste espace pour sauter, bondir et courir ;
  • le territoire est balisé par des dépôts de crottes dures, notamment au sein de latrines communautaires ; mâles et femelles marquent aussi avec leur « menton » ; les mâles effectuent également des grattis au sol ; les frontières du territoire sont marquées par les mâles pour le délimiter ;
  • combats du lapin mâle en cas d’intrusion sur le territoire d’un autre mâle étranger ;
  • de très nombreuses espèces végétales au menu (surtout des graminées, mais aussi des plantes et feuillages variés, des écorces et racines l’hiver, et parfois des baies) et un comportement sélectif dans l’alimentation.
  • Il a besoin d’un espace de vie suffisamment vaste pour explorer, sauter, bondir, courir (une cage ne suffit pas), et de sorties quotidiennes s’il ne vit pas en liberté ;
  • Il est naturellement propre : le bac à litière, qui doit être suffisamment grand, remplace les latrines collectives ;
  • Il fait chaque jour le tour de son milieu de vie (enclos, pièce, terrasse, appartement, maison) pour le marquer (avec son « menton » ou en grattant le sol uniquement quand il est stérilisé et éduqué à la propreté);
  • Il montre un comportement territorial différencié entre mâles et femelles (l’habitat vs le territoire) ;
  • Il montre également des comportements de défense face aux intrusions (autre lapin, autre animal, main du propriétaire…) ;
  • Il a besoin de pouvoir fouiller dans son foin pour trouver les meilleurs brins, de se déplacer en différents endroits pour chercher sa nourriture (foraging), de disposer de verdure/feuillages variés ;
  • S’il ne dispose pas d’objets à grignoter et gratter, il s’attaquera à vos meubles ; il s’attaquera dans tous les cas à vos fils électriques et plantes toxiques s’ils ne sont pas sécurisés.
3. Vie sociale du lapin de garenne 3. Vie sociale du lapin de compagnie
  • Un couple de lapins dominants, mais pas de monogamie de la part du mâle dominant (donc toujours plus de femelles que de mâles) et des jeunes mâles ; différents groupes familiaux peuvent cohabiter sur un même territoire s’il est suffisamment vaste ;
  • Ils mangent et dorment les uns à côté des autres et se toilettent mutuellement ; en dehors de la période de reproduction, il existe une « vie familiale » dans le terrier ; les jeunes jouent ensemble notamment pour s’entraîner aux comportements de fuite et de défense du territoire…
  • Nombreux prédateurs terrestres et aériens : les lapins partagent le rôle de surveillance et d’alerte (notamment en tapant de la patte arrière) ;
  • Grande importance des enjeux de reproduction (de février à août) : combats entre mâles pour les femelles (suivis d’exclusions du territoire), entre femelles pour l’emplacement de leur nid ;
  • Hiérarchie en fonction de la priorité dans l’accès aux ressources (femelles, terriers, nourriture la plus riche); sécrétions hormonales spécifiques .
  • Besoin de vivre avec au moins un congénère de son espèce (stérilisé également), qui peut communiquer avec lui ; ce congénère lui permet également d’être plus serein (deux paires d’oreilles valent mieux qu’une, même en l’absence de prédateur) ; comportement d’alerte, même quand le lapin vit seul (il tape de la patte arrière lorsqu’il croit percevoir un danger);
  • Stabilité des couples stérilisés mâle-femelle ; cohabitation souvent un peu plus tumultueuse entre femelles stérilisées ; cohabitation plus difficile à initier mais possible entre mâles stérilisés ;
  • Une hiérarchie beaucoup plus souple et atténuée (plus d’enjeu de reproduction, faible enjeu de l’alimentation) : inexistante dans un couple mixte, et surtout présente au sein d’un groupe  de plusieurs lapins ;
  • Comportements de stress (et donc agressivité) potentiellement accentués (ex : établissement de la cohabitation), en raison du manque d’espace et donc de possibilité d’éloignement ou de fuite dans nos domiciles ; absence de choix des congénères ;
  • Grande importance des lapins posés et « bien dans leurs pattes », qui mettent du liant dans le couple ou le groupe (toilettages « non hiérarchiques », toilettages simultanés, siestes  en couple ou en groupe les uns sur les autres), qui le tranquillisent et oeuvrent au rapprochement de lapins qui s’entendent moins bien ;
  • Comportements observés d’entraide, de protection et d’empathie envers des lapins handicapés ou malades.
4. Rythme de vie du lapin de garenne 4. Rythme de vie du lapin de compagnie
  • il reste abrité dans son terrier plus de la moitié de la journée ;
  • il sort principalement en début et fin de journée, ainsi que la nuit ;
  • en l’absence de prédateur, il peut faire des siestes au soleil à l’extérieur du terrier dans la journée.
  • il est plus actif en début et fin de journée et dort le plus souvent de la fin de la matinée à la fin de l’après-midi ;
  • il s’adapte le plus souvent aux horaires de son propriétaire (départ/retour du travail ou de l’école, horaires de distribution du foin et de la verdure…) ;
  • il dort facilement à découvert dès qu’il se sent en sécurité ;
  • il peut être assez actif la nuit (c’est pourquoi il est déconseillé de le loger dans une chambre) ;
  • ses phases de sommeil tendent à se prolonger avec le vieillissement.

Les limites de la comparaison

  • L’étude du comportement du lapin de garenne est très marquée par ses débuts : elle visait alors à mieux lutter contre un « nuisible », d’où l’importante focalisation sur les enjeux de reproduction, colonisation (dispersion des mâles adultes) et hiérarchie ;
  • L’étude du comportement du lapin de garenne a principalement été réalisée dans un environnement artificiel : prairies clôturées avec terriers préexistants, terriers artificiels… Ces environnement clos dans lesquels les individus ne choisissent ni leurs congénères ni leur territoire peuvent entraîner du stress, et accroître les comportements agressifs et hiérarchiques de ces animaux sauvages. Les conclusions tirées de l’observation du comportement des loups en parc zoologique, qui ont longtemps servi de référentiel dans l’analyse du comportement des chiens, sont aujourd’hui remises en cause pour cette raison (notamment s’agissant de l’importance de la hiérarchie et de sa description).
  • La priorité dans l’accès aux ressources (lieu de couchage, nourriture, toilettages…) pourrait être en partie à géométrie variable, la reproduction n’étant peut-être pas la seule clé de lecture pertinente, d’autant plus qu’elle n’occupe qu’une partie de l’année. En tout état de cause, il peut être utile de prendre du recul face aux grilles de lecture qui semblent intangibles et empêchent peut-être de voir d’autres choses.
  • Ce sont les comportements qui n’impliquent pas les enjeux de reproduction qui sont les plus intéressants dans l’analyse du comportement des lapins de compagnie, étant donné qu’ils sont stérilisés. Il existe une autre différence importante entre les garennes et nos lapins : leur espérance de vie. Or, le vieillissement tend à modifier le comportement de nos lapins.