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1. La cohabitation avec un congénère, une des clés du bien-être de votre lapin

Lorsque l’on a le plaisir de partager son quotidien avec un lapin de compagnie, la question peut un jour se poser de lui trouver un compagnon avec lequel il pourra vivre.

Les lapins sont des animaux extrêmement sociaux qui sont faits pour vivre avec leurs congénères. Un lapin vivant seul avec vous ne sera pas pour autant malheureux, mais il vous faudra compenser très imparfaitement cette absence de congénère en lui consacrant beaucoup de temps et d’attention. Et il ne faut pas oublier que la communication avec votre lapin ne peut se bâtir que sur une incompréhension partagée, entrecoupée de moments de partage liés à l’habitude et à l’observation de l’autre. Par ailleurs, un autre animal (chien, chat, cochon d’inde, etc.) ne remplacera jamais pour votre lapin un compagnon de son espèce, qui sera le seul avec lequel il pourra vraiment communiquer et donc pleinement vivre sa vie de lapin.

Les lapins sont des proies. Le fait de vivre avec un congénère et de partager son habitat avec lui est un facteur très rassurant et stabilisant, qui contribue à son équilibre. C’est l’application du principe selon lequel « quatre oreilles valent mieux que deux ». Dans la nature, les lapins préfèrent rester en groupe, même en dehors de leur terrier, car ils sont ainsi capable de mieux percevoir un éventuel danger qui approcherait. Comme j’ai souvent pu le voir à la maison, les lapins ont tendance à se regrouper pour dormir. Ils adoptent plus facilement des positions de détente (pattes arrières sur le côté ou dans le prolongement de leur corps, ou alongés sur le flanc) lorsqu’ils dorment les uns près des autres. Un lapin qui dort seul, isolé de ses congénères, dormira le plus souvent « sur une oreille », sans fermer complètement les yeux, et en restant alongé « en poule ».

Par ailleurs, si vous aimez les lapins, vous commencerez à mieux les comprendre et les apprécier en observant leurs comportements entre eux. Un lapin seul est bien souvent beaucoup plus ennuyeux à observer qu’un lapin stimulé à chaque moment de la journée par un congénère avec lequel il vit en bonne entente.

Permettre à son lapin de compagnie de vivre avec un autre lapin est donc un élément essentiel à son bien-être et permet d’avoir un meilleur aperçu (souvent distrayant) de toute la richesse du comportement des lapins.

2. Des questions pratiques incontournables

Avant de penser à adopter un deuxième lapin, il est nécessaire de se poser quelques questions pratiques:

Ai-je suffisamment de temps pour m’occuper de deux lapins? On n’adopte pas un deuxième lapin pour qu’il tienne compagnie à un lapin auquel on ne peut déjà pas consacrer beaucoup de temps. Pour un lapin, comme pour n’importe quel animal de compagnie, le rôle du propriétaire est indispensable, notamment pour jouer les régulateurs au sein du groupe. Avec l’arrivée de votre deuxième compagnon, vous passerez nécessairement plus de temps avec vos animaux, car chacun d’entre eux aura besoin d’établir une relation individuelle avec vous (exactement comme lorsque l’on n’a qu’un seul lapin), et il faudra consacrer également du temps au groupe.

Suis-je prêt(e) à assumer les frais et tâches ménagères que nécessitent un deuxième lapin? Un deuxième lapin, c’est potentiellement deux fois plus de frais vétérinaires, et c’est assurément deux fois plus de dépenses en légumes, granulés, foin, etc. Cela suppose aussi de ramasser deux fois plus de crottes, de nettoyer deux fois plus de bêtises quand les lapins sont jeunes. Par ailleurs, deux lapins, ça suppose une cage de transport plus grande (modèle pour chat au minimum) et ça se fait moins facilement garder pendant les vacances (avec leur enclos… mais cela rend possible la garde à domicile).

Ai-je suffisamment de place pour accueillir un deuxième lapin? Normalement, la question ne se pose pas, car il faut autant de place pour un ou deux lapins dans un enclos. Evidemment, si votre lapin vivait seul dans une cage de 1m20, celle-ci devient très insuffisante pour deux lapins. L’idéal est alors de laisser les lapins en liberté dans un enclos, avec une cabane, ou de les laisser en liberté dans une ou plusieurs pièces sécurisées si vous en avez la possibilité, en leur aménageant un coin où ils peuvent manger, faire leurs besoins, dormir, se cacher, etc. Si vous aviez une cage pour votre premier lapin, gardez-la quand même, car elle peut toujours être utile pour isoler un lapin en cas de maladie, fracture, etc. Par ailleurs, en cas d’échec total de la cohabitation (ce qui est très rare), avez-vous la possibilité d’installer votre deuxième lapin chez vous dans des conditions aussi bonnes que le premier?

Suis-je prêt(e) à faire stériliser mes lapins? Certaines personnes ont une opposition de principe à la stérilisation des animaux. Dans ce cas, il vaut mieux n’avoir qu’un seul lapin. Comme on le verra dans la suite de l’article, les hormones sexuelles jouent le plus souvent les troubles fêtes dans l’établissement d’une cohabitation, la rendant parfois impossible. Deux lapins de même sexe peuvent se blesser à mort, tandis qu’un mâle et une femelle feront des portées à répétition qui mettront en danger la santé de la lapine. Pour ceux qui trouveraient que ça n’a rien de « naturel » de faire castrer son lapin ou stériliser sa lapine, il peut être utile de rappeler que ce qui n’est pas « naturel », c’est d’avoir des animaux de compagnie à la maison. En les introduisant dans nos foyers confortables, nous mettons les lapins en situation de reproduction permanente, contrairement aux lapins de garenne qui sont influencés par les saisons dans leurs cycles de reproduction et ne se reproduisent ainsi que quelques mois par an. Rappelons également que les périodes de reproduction sont les moments de tension et de conflits au sein du groupe et de sa hiérarchie, marqués par des combats (entre mâles et entre femelles). A moins de vouloir être en permanence dans cette situation de combats et de rivalités chez vous, il est donc souhaitable de faire stériliser les deux lapins (la stérilisation d’un seul ne réglerait rien aux problèmes hormonaux et de comportement de l’autre).

Suis-je prêt(e) à voir la relation que j’ai établie avec mon premier lapin changer? Introduire un nouveau lapin à la maison, c’est nécessairement redistribuer entièrement les cartes. Votre lapin sera très occupé par son congénère et sollicitera peut-être moins votre attention. Votre relation se déroulera également « sous le regard » de l’autre lapin. Par nécessité hiérarchique (on pourrait presque dire par souci de son image de marque et de son statut), votre lapin sera peut-être plus distant avec vous, car il aura une place à tenir vis-à-vis de son congénère. Votre lapin peut également faire preuve de jalousie et vous montrer son mécontentement, voire son énervement, notamment si vous adoptez un lapin de même sexe. Votre lapin peut également déprimer, si vous introduisez un autre lapin beaucoup plus dominant que lui et qui lui fait perdre son statut de petit roi de la maison. Chez certains lapins, cette déprime peut se transformer en stress très important, voire en peur du congénère qui vient renverser toutes les habitudes établies. Dans tous les cas, votre lapin changera en raison de la présence de l’autre et de la possibilité que celui-ci lui offrira d’exprimer une plus grand palette de comportements. Ne soyez pas vexé(e) par l’éloignement qui s’instaure avec votre lapin et ne regrettez pas l’arrivée du numéro deux (d’autant plus que l’inverse peut aussi se produire: un lapin distant peut se rapprocher de vous sous l’influence du deuxième arrivé qui se montre très proche de vous). Les deux lapins le sentiraient et cela nuirait à votre relation. Essayez plutôt d’accompagner ce changement, en jouant votre rôle de propriétaire des lapins, et d’en voir les aspects positifs.

3. Et si j’adoptais deux lapins en même temps?

3.1. Deux jeunes lapins

Si vous adoptez deux jeunes lapereaux (qu’ils soient de la même portée ou qu’ils n’aient jamais été en contact auparavant), vous partez en terre inconnue s’agissant de leurs futurs caractères et comportements. Mais vous pouvez néanmoins avoir une certitude: vous serez obligé(e) de les séparer à la puberté, dès quatre mois, en attendant leur stérilisation. S’ils sont du même sexe, ils risquent de rapidement passer leur temps à se battre, et s’ils sont de sexe opposé, votre lapin va passer son temps à importuner votre lapine et vous allez vous retrouver avec une portée de lapereaux sur les bras en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Il est donc beaucoup plus simple de commencer par adopter un seul lapin, d’attendre l’âge auquel on peut le faire stériliser (4 mois pour un mâle, 6 mois pour une femelle), puis d’en adopter un autre.

3.2. Deux lapins adultes qui ne se connaissent pas

Il est bien entendu nécessaire que ces deux lapins soient stérilisés. Il peut être utile d’organiser plusieurs rencontres entre les lapins avant de les adopter. Une seule rencontre ne suffit pas et risque de vous décevoir. Les lapins ont rarement des coups de foudre et sont très influencés par le milieu (chez qui, dans quel endroit) et les circonstances (dans quel contexte, après quel trajet) se déroulent la première rencontre. Celle-ci risque de ne vous donner qu’un aperçu peu probant de ce que pourrait être leurs relations à l’avenir. En adoptant via une association, vous pouvez demander s’il lui est possible d’organiser des rencontres régulières, dans un même endroit, entre les deux lapins. Mais encore une fois, les premières impressions peuvent être trompeuses et une cohabitation ne peut s’inscrire que dans la durée, si bien qu’elle est très difficile à évaluer lors des premières rencontres, en dehors des cas où tout se passe immédiatement bien.

3.4. Deux lapins adultes qui sont habitués à vivre ensemble

C’est la solution clé en main que l’on trouve parfois au sein d’associations qui recueillent des lapins abandonnés. J’ai ainsi adopté Ambre et Vénus, issues du même sauvetage, qui vivaient déjà ensemble depuis plusieurs mois (après avoir été recueillis par l’association), mais surtout Tarquin et Hermès qui cohabitaient ensemble depuis un an et demi (dans leur précédente famille). L’ancienneté de la cohabitation est alors souvent renforcée par l’épreuve que représente l’abandon et le changement de famille. A la maison, ce sont Tarquin et Hermès, deux mâles, qui forment le couple le plus soudé, devant Daphné et Chloé (deux femelles) et Flore et Domino (une femelle et un mâle). Il est souvent plus difficile pour les associations de placer ces couples de lapins, car les personnes qui font appel à elles ont souvent déjà un ou plusieurs lapins. Si vous n’avez pas encore de lapins, je vous invite vivement à vous tourner vers l’adoption d’un couple de lapins adultes auprès d’une association, qui est assurément la solution la plus facile et la plus avisée.

4. Mâle ou femelle? Une fausse question, car tout dépend du caractère des lapins

Il y a beaucoup de préjugés en matière de cohabitation entre lapins. On lit souvent que la cohabitation entre mâles, même lorsqu’ils sont castrés, est très difficile, voire impossible. J’ai pourtant fait l’expérience pendant un an de la cohabitation de 4 mâles (Swap, Domino, Tarquin et Hermès) en présence de 6 femelles, tout ce petit monde vivant en bonne entente, en liberté dans la même pièce.

Depuis que j’ai mes lapins, j’ai organisé les cohabitations, afin de leur permettre de former un groupe de plus en plus large et d’accueillir les petits nouveaux qui sont arrivés progressivement. J’ai également dû gérer les décès et toutes les maladies contagieuses qui ont abouti à l’éclatement du groupe en 2009. Je suis actuellement dans une phase de rétablissement des cohabitations anciennes et de nouvelles cohabitation. Bref, j’ai passé beaucoup de temps à gérer des cohabitations entre lapins depuis 3 ans. La principale leçon que j’en retire, c’est que bien avant d’être une question de sexe du lapin, la cohabitation dépend du caractère de celui-ci. Evidemment, ça complique beaucoup les choses, car il est beaucoup plus facile de déterminer le sexe d’un lapin au moment de son adoption (sauf, peut-être, lorsqu’on le demande au vendeur d’une animalerie) que d’évaluer son caractère.

Les lapins les plus difficiles à faire cohabiter avec leurs congénères sont ceux qui sont de nature craintive, stressée, anxieuse. Le type même de lapin qui a sans cesse besoin d’être rassuré. Soit il se montrera agressif en toute occasion (envers son propriétaire aussi), soit il nouera une relation exclusive avec son propriétaire (et se montrera facilement destabilisé et donc agressif envers les individus extérieurs à cette relation). Mais il ne s’agit pas de mettre dans cette « case » tous les lapins qui font preuve d’agressivité (je vous renvoie pour cela à l’article sur l’agressivité chez le lapin): il ne s’agit que d’une petite partie des lapins qui se montrent agressifs. On peut s’interroger sur l’expérience que ces lapins ont vécue lors de leurs premières semaines, au cours de la phase de socialisation, qui est notamment essentielle dans l’apprentissage de la vie en groupe. A la maison, je pense notamment à Esope et, dans une moindre mesure, à Swap, Ambre, et Vénus. Ils représentent souvent le point d’achoppement des cohabitations.

Les lapins les plus faciles à faire cohabiter avec leurs congénères sont les lapins « bien dans leurs pattes », si je puis dire: ceux qui sont confiants, détendus, curieux, fonceurs sans se montrer nerveux, calmes face à quelque chose de nouveau ou d’inattendu. Ils peuvent se montrer prudents face à un congénère inconnu, ou un autre animal, mais ne sont ni méfiants ni effrayés. Si votre lapin semble difficilement déstabilisé et qu’il accueille « d’un oeil bienveillant » les changements modérés et la nouveauté, c’est souvent bon signe. A la maison, il y a eu Thalia, et il y a toujours Hermine, Domino et Daphné qui présentent ce profil, et dans une moindre mesure Flore et Tibulle. Ce sont des élément stabilisant d’une cohabitation et ce sont souvent les éléments dominants du groupe.

C’est pourquoi il peut être utile de se renseigner autant que possible sur le lapin avant son adoption, sans toutefois perdre de vue que rares seront les personnes qui vous informeront d’un problème de caractère/comportement, l’objectif étant que le lapin soit adopté (mais parfois simplement aussi parce qu’ils n’ont pas eu l’occasion de le constater). Les éleveurs aiment souvent parler du comportement des parents du lapereau, mais ce n’est pas une garantie: mieux vaut les faire parler du comportement du lapereau/lapin avec les autres lapins (notamment de sa portée), et s’informer sur le cadre de vie et la socialisation au cours de ses premières semaines. Les associations qui recueillent des lapins peuvent vous parler du comportement avéré du lapin à l’âge adulte, mais elles n’ont souvent aucune information sur ses premières semaines. Quant aux animaleries, elles ne savent rien sur le caractère du lapin.

Les questions de hiérarchie viennent ensuite se greffer sur le caractère de chacun. Il est souvent moins risqué, de ce point de vue, de choisir un lapin de sexe opposé qui ne sera pas un concurrent direct du lapin que vous avez déjà. Par ailleurs, il est vain d’essayer d’estimer si votre lapin est dominant ou pas au regard de la relation que vous avez avec lui: n’oubliez pas que vous n’êtes pas un lapin 🙂 La relation que vous avez avec lui, même si elle se fait sur le mode lapin de sa part, est spécifique et particulière, et ne permet pas de connaître la position qu’il aura vis-à-vis de ses congénères. Nous reviendrons par la suite sur l’établissement de la hiérarchie, qui est la clé de la mise en place d’une cohabitation.

Il y aurait donc deux bonnes raisons de choisir un couple mixte de lapins: d’une part, si vous avez un lapin très stressé en permanence, c’est la configuration la plus rassurante et la plus valorisante, et d’autre part, c’est hiérarchiquement le choix qui est susceptible de créer le moins de conflits. Toutefois, c’est le choix de la moindre prise de risque, ce qui ne signifie pas que les lapins vont forcément bien s’entendre. Autre réserve: il devient ensuite beaucoup plus délicat d’agrandir le groupe quand le noyau de base est un couple mixte, sauf si, par chance, il s’affirme comme le couple de dominants du groupe ainsi élargi. Par ailleurs, je ne fais aucune distinction entre la cohabitation entre deux femelles stérilisées et celle entre deux mâles castrés. Certes, chacune a ses spécificités pour les lapins, mais, pour leur propriétaire, elles posent les mêmes problèmes. Dans les trois configurations possibles, tout dépendra du caractère des deux lapins et de leur positionnement hiérarchiqueainsi que du travail d’accompagnement de vos lapins que vous réaliserez.

5. Il n’y a pas de recette miracle a priori

Ainsi, à moins d’adopter deux lapins adultes habitués à vivre ensemble, quel que soit leur sexe, vous ne pouvez avoir aucune certitude sur la réussite de la cohabitation, même si les échecs complets sont rares. L’adoption de votre deuxième lapin n’est pas différente de celle du premier: vous l’adoptez sans le connaître, souvent sur des critères physiques. Il est vain de vouloir adopter un lapin « en fonction de » celui qui est déjà à la maison. Avec l’arrivée du deuxième lapin, c’est une nouvelle aventure qui commence, pour laquelle vous ne pouvez avoir aucune garantie a priori et pour laquelle il faut abandonner d’éventuels préjugés sur les cohabitations.

Chaque lapin a sa propre personnalité: la cohabitation entre vos lapins sera donc unique. Certains éclairages sur l’établissement de la hiérarchie peuvent vous aider à faire votre travail de propriétaire qui facilite et assure le bon déroulement de la cohabitation, certains encouragements peuvent vous aider à persévérer quand la situation semble décourageante. Mais personne ne peut vous donner de solutions clé en main. Et n’oubliez pas que personne ne connaît mieux vos lapins que vous, qui les observez et vivez avec eux chaque jour.

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