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1. L’importance du langage corporel chez le lapin
La position du corps, celle des oreilles et de la queue forment un langage corporel auquel les lapins sont sensibles et qui peut exprimer la soumission, la peur, l’agressivité, la détente, la curiosité, etc. Dans la communication entre animaux, les mouvements du corps présentent l’avantage de pouvoir être modulés ou atténués rapidement afin de modifier le message transmis à ses congénères en fonction de leur réaction. Un lapin mâle va-t-en guerre peut approcher avec un air agressif et conquérant un autre lapin mâle (la queue relevée, le corps surélevé par rapport au sol pour donner l’impression qu’il est plus gros que son adversaire, les oreilles en arrière), mais s’il se rend compte qu’il a en face de lui un mâle plus dominant et fort que lui, il peut rapidement passer à une posture de soumission (la queue basse, le corps au ras du sol pour se faire tout petit, les oreilles couchées) et passer son chemin. Le langage corporel, comme l’indique Shirley Seaman dans un article sur les moyens d’expression des lapins (Getting the message, Rabbiting On, hiver 2008) est « souvent utilisé quand les individus établissent leur hiérarchie » et dans les rapports de force territoriaux.
Cette expression corporelle permet de prévenir bien des conflits et d’éviter les combats de domination entre lapins qui, souvent très violents, demandent beaucoup d’énergie et génèrent des blessures. Les mesures d’intimidation du mâle dominant, par exemple, régulent les relations sociales au sein d’un groupe de lapins. Mais si ces signaux évitent bien des conflits liés à l’agressivité de domination, ils ne sont que l’annonce d’un combat en cas d’agressivité défensive: quand il s’agit de défendre sa personne qu’il sent mise en danger par un autre lapin, le lapin attaquera dans tous les cas.
L’apprentissage de cette communication visuelle subtile (l’exercice de sa compréhension aussi bien que de son utilisation) se déroule dans la première phase de socialisation du jeune lapereau avec le groupe. Si le propriétaire du lapin souhaite mieux comprendre son animal, il devra lui aussi se mettre à l’école du langage corporel du lapin. Cela lui permettra également de mieux comprendre les gestes qui peuvent être mal interprétés par son animal de compagnie. Je ne pense pas que nos animaux de compagnie nous prennent pour de gros lapins (contrairement aux hommes qui ont souvent tendance à humaniser leurs animaux), mais certains gestes peuvent passer naturellement dans la relation entre l’animal et son maître. Ne vous étonnez pas si, par la suite, vous vous retrouvez à faire du plat ventre pour saluer votre lapin nez contre museau ou si, pour exprimer votre mécontentement suite à une bêtise de votre lapin, vous sortez de la pièce en frottant énergiquement vos pieds au sol comme sur un paillasson.
Une grande partie de la communication visuelle du lapin passe par la position de ses oreilles. On peut donc s’interroger sur le cas du lapin bélier, avec ses oreilles tombantes. Certains lapins béliers ont gardé une mobilité assez importante de leurs oreilles et sont capable de les orienter vers la source du bruit qu’ils perçoivent. Certains peuvent même lever une oreille lorsqu’ils entendent un bruit vraiment intéressant (comme le bruit des légumes que l’on est en train de préparer pour eux). Mais les critères de « race » des éleveurs sont tels qu’un lapin bélier doit normalement avoir des oreilles bien tombantes, immobiles. C’est assurément un handicap pour le lapin qui, s’il garde une bonne ouïe, est privé d’un moyen d’expression variée. On pourrait même penser que cela peut brouiller la communication entre individus. Je suis souvent surprise quand je vois Thalia, une de mes lapines bélier, subitement attaquer un autre lapin, car il me semble qu’elle ne donne aucun préavis, en dehors de sa queue relevée. Toutefois, cela n’empêche pas les lapins de bien se comprendre entre eux, car ils utilisent la communication olfactive ou sensorielle, voire auditive, en même temps que la communication visuelle: mes six lapins béliers communiquent sans problème avec les six lapins à oreilles droites avec lesquels ils cohabitent.
2. Les attitudes caractéristiques
2.1. Mouvements de la queue
Au repos, la queue du lapin reste en position horizontale et on la remarque assez peu. Elle ressemble au fameux pompon qui a fait la célébrité des lapins.
Les lapins de compagnie ont souvent des couleurs élaborées issues des divers croisements, si bien que le dessus et le dessous de la queue sont de la même couleur ou ont des tâches de couleur réparties sans ordre particulier. Chez le lapin de garenne, le dessous du corps et de la queue sont blanc, ce qui tranche avec la couleur « gris garenne » du dessus de leur corps et la couleur noire du dessus de leur queue. Daphnée, une de mes lapines, a un pelage « gris garenne » qui permet de voir cette différence.
Dès lors, on comprend que les mouvements de la queue peuvent devenir un signal visuel très important pour les lapins: lorsque la queue est au repos, on ne voit presque pas de blanc, tandis que lorsque la queue est relevée, ont distingue une tâche de couleur blanche. Quand un lapin court pour fuir un danger, ses congénères peuvent voir le dessous blanc de la queue. Si le lapin est agressif et lève la queue à la verticale, les autres lapins sont également très clairement prévenus. De même, lors de la parade amoureuse, lorsque le lapin lève la queue en tournant autour de la femelle, celle-ci ne manquera pas de voir cette tâche blanche.
Chez le lapin de compagnie stérilisé, les mouvements de la queue traduisent principalement:
– l’excitation, lorsque la queue se met à frétiller légèrement,
– la montée de l’agressivité, lorsque le lapin relève franchement et subitement sa queue à la verticale.
Dans ce dernier cas, il suffit que le lapin renifle un lapin rival ou ses crottes ou même l’odeur que ce lapin a laissé sur votre main pour qu’il relève brusquement la queue. Le mâle dominant qui tente d’intimider un autre lapin s’avancera également vers lui, l’arrière train relevé, la queue à la verticale, le museau en avant, les oreilles couchées, en grognant. Lorsque le propriétaire de plusieurs lapins de compagnie voit que deux de ses lapins ont la queue à la verticale, c’est le signal qu’ils vont se battre l’instant d’après (lorsqu’un seul lapin a la queue relevée et que l’autre fuit, il n’y a pas de problème). C’est donc un bon signal pour trouver le juste moment pour intervenir rapidement (voir: la cohabitation entre lapins: les premiers pas de la cohabitation).
Le lapin se sert également de sa queue comme d’un balancier, sans que sa position ait une signification particulière, mais dans ce cas il ne la met jamais tout à fait à la verticale et n’a pas l’arrière train relevé. Lorsqu’il se penche en avant, par exemple avant de sauter d’un fauteuil ou d’un chaise, il a tendance à baisser la queue puis, quand il se redresse, sa queue retrouve une position normale.
Quand le lapin s’approche à petits pas d’un objet inconnu, les oreilles faisant face à cet objet, le corps au sol et le museau pointé en avant, il a également tendance à baisser sa queue. Dans cette position, le lapin montre qu’il n’est pas franchement rassuré mais que sa curiosité l’emporte sur la crainte. S’il adopte la même position mais avec les oreilles couchées, c’est qu’il exprime sa crainte ou sa soumission (voir: les mouvements des oreilles).
Enfin, le lapin lève un peu la queue quand il se met en position pour uriner: si le lapin lève exagérément la queue lorsqu’il souhaite uriner dans son bac à litière, mieux vaut s’assurer qu’il ne souffre pas d’un problème de santé urinaire (voir: le comportement du lapin malade).